Par Diane Z.
« La berline noire arriva en grande pompe et s’arrêta sur le trottoir de la rue de Rivoli face à la grille d’entrée du jardin des Tuileries. Le chauffeur manœuvra pour déposer sa cliente juste en face du tapis rouge et il se précipita pour ouvrir la portière de Madame. Des pieds nus chaussés de vertigineux escarpins en soie crème apparurent. Ils se figèrent sur les pavés, hostiles envers cette peau pâle et frissonnante qui arbore fièrement des orteils laqués. Les flashes des photographes commencèrent à crépiter.
Madame Mode, toute de Balenciaga vêtue, descendit de la voiture en ajustant ses immenses lunettes noires, de rigueur en ce début de mois de mars (le soleil était aussi au rendez-vous de la Fashion Week parisienne). Selon l’étiquette de la cour du Louvre, elle ne s’encombre que de son Smartphone. Son intendant suit derrière elle, dans l’ombre, avec son manteau d’astrakan et son sac Vuitton.
Une attachée de presse, silhouette filiforme et noire à Blackberry greffé à l’oreille, apparemment en état d’affolement interne aiguë, s’avança précipitamment avec un sourire crispé.
Tout le monde attend Madame. Celle-ci gratifie d’un coup d’œil indifférent les admirateurs et les amateurs de mode venus spécialement pour la voir, elle. La jeune femme suit avec nonchalance le chemin tortueux qu’on essaie de lui frayer. Elle ne manque pas de refuser d’un signe du doigt une interview à une Japonaise qui brandissait violemment son micro avec elle.
En cet après-midi printanière, la Haute-Couture s’était installée sous une immense tente dans les jardins royaux de la capitale. Se frayant un passage à travers la foule, Madame réussit finalement à se faufiler entre les photographes et les multiples barrages en tous genres. Enfin, elle pénétra dans la salle des défilés.
A l’arrivée de Madame, les photographes s’animèrent tels des automates. Les journalistes, agacés, se resserraient encore plus sur les rangs déjà compacts qui entouraient le podium. Quelque deux mille paires d’yeux envieux observaient son entrée tant attendue. Mais, la jeune femme n’en avait que faire ! Majestueuse et resplendissante, elle traversa la salle à pas lents. Elle prit place au premier rang, exactement dans l’axe du podium. La meilleur place. Quittant ses lunettes, elle promena son regard sur la foule, savourant son pouvoir.
La lumière s’éteignit. La magie des défilés de robes époustouflantes pouvait opérer !